J'ai tenté de traiter cette semaine quelques sujets qui me semblaient intéressants – l'homme d'Etat de gauche, l'élection d'Obama, l'invraisemblable prétention de Nicolas Sarkozy à se maintenir à la tête de l'Europe au delà de la présidence française. Vous paraissez plutôt intéressés, passionnés parfois, par les pronostics en vue du Congrès de Reims. Soit. Parlons-en, alors.
Le « buzz » de cette fin de semaine, la rumeur qui agite le landerneau, véhiculée notamment par « Le Parisien - Aujourd'hui », qui y a consacré deux articles, est la difficulté supposée de Bertrand Delanoë et de la motion A. Tout le prouverait. Le nombre de signataires en faveur de Ségolène Royal – et même de Martine Aubry, voire Benoît Hamon – serait supérieur au sien, l'affluence aux réunions publiques – par exemple à Marseille – serait plus faible, et surtout, surtout, les « pointeurs » le verraient maintenant en 2ème position. Ce florilège, qui fait sourire, m'incite à plonger avec vous dans les coulisses, le « making-off » du Congrès. D'abord les signatures. L'indicateur est peu fiable, il témoigne seulement du type d'organisation de la motion, plus ou moins centralisée, de l'efficacité des réseaux internet. A l'évidence, Ségolène Royal, avec « Désir d'avenir », a sur ce terrain une certaine avance. La motion A n'a pas fait, à l'échelle nationale, de « chasse aux signatures ». Mais la collecte fonctionne, et bien, à l'échelle locale. Pour vous donner un exemple, que je connais, cette motion a recueilli d'ores et déjà l'assentiment de 350 camarades dans le Doubs, fédération moyenne par sa taille et libre par son vote. Si l'on multipliait par 100 départements et fédérations – ce que je me garderai bien de faire – cela aboutirait à 35.000 signatures. Je n'en tire aucune conclusion, sinon l'absurdité de cette mesure. Ensuite l'affluence. Elle dépend, là aussi, de l'organisation de la campagne. Ségolène Royal fait peu de réunions, elle les tient avec une mobilisation régionale, Bertrand Delanoë – et moi aussi – tournons beaucoup, très près du terrain, avec des publics plus modestes – mais nullement négligeables – en des lieux plus nombreux. Et chacun sait que Marseille n'est pas, pour lui, l'endroit le plus facile – même si je n'ai pas vu, pour ma part, le reportage sur France 2, et si je conserve estime et amitié pour mes camarades des Bouches-du-Rhône.
Reste les fameux « pointeurs ». Au parti, il y a plusieurs groupes qui travaillent à la fabrication d'un Congrès. Les « intellos » rédigent les motions, les argumentaires, les tribunes. Les « poètes » s'occupent de l'appareil, du corps électoral, de l'organisation concrète – et complexe – du Congrès. Qui sont les « pointeurs » ? Des camarades, peu médiatisés, qui connaissent bien le parti, sont en contact avec les correspondants des motions, évaluent la mobilisation avec finesse. Je respecte leur flair, souvent puissant, ils repèrent des tendances, apprécient la qualité des campagne. Mais je sais aussi leur fraternelle férocité, leur sens de l' « intox », leur sympathique mauvaise foi. Ce sont eux qui n'ont pas tous vu venir Ségolène Royal en 2006. Eux, encore, qui ont laissé croire pendant un an que 85% des amis de DSK étaient « reconstructeurs ».... alors que c'était exactement l'inverse. Eux, toujours, qui aujourd'hui, parce qu'il porte le poids du Congrès, et pour semer le doute, disent Bertrand Delanoë affaibli.
J'avoue qu'ils m'impressionnent peu. Ce que je vois, pour ma part, c'est un Congrès difficile, tendu, qui confirme mon intuition initiale : les socialistes n'ont pas tant besoin d'un « chef », d'un candidat pour 2012, que d'une remise au travail collective. Mais pour cela, il faut une épine dorsale, une motion qui puisse l'organiser, en arrivant largement en tête. Je regrette le ton de certains échanges, les polémiques inutiles et de mauvaise foi sur le libéralisme supposé de Bertrand Delanoë – il est politique, et non économique – la caractérisation de sa motion comme celle des sortants – en réalité présents dans toutes les motions. La motion A ne bénéficie pas, c'est vrai, du soutien des « grandes fédérations » où l'on annonce des votes assez... groupés, mais elle est très présente dans tout le parti, elle compte sur la dignité du débat et sur la liberté des militants. Ce ne seront pas les pointages ou les sondages qui vont compter, mais bien le vote des socialistes, le 6 novembre. Ils vont, je l'espère, je le crois, donner tort aux rumeurs. Je ne ménagerai pas ma peine, pour que le Congrès de Reims échappe à la confusion et aux combinaisons, et que s'en dégage un pôle de rassemblement, sans lequel le parti serait condamné à la division et à la facilité intellectuelle. Pour l'avenir du PS et de la gauche, c'est tout simplement vital.
PS : pour me détendre, et rire un peu, il m'arrive de consulter les blogs de mes opposants dans le Pays de Montbéliard. Suivant vos avis, je ne parlerai plus de celui de M. Souvet, qui n'a pas suivi mes conseils, dictés par une inconsciente affection et qui, tous les jours, distille un triple et passionnant message : c'était mieux avant, mes successeurs sont nuls, de toute façon on ne peut rien faire. Si ça lui fait plaisir, j'en suis content. Le plus succulent est le blog de l'UMP de la 4ème circonscription du Doubs. Leur dernier post se demandait finement « Qui a vu Pierre Moscovici dans le Doubs ? », prétendant que j'y avais consacré 3 jours... ce mois. Pauvres dirigeants de l'UMP ! Sortez de votre blog et de vos cancans, lisez le journal, baladez-vous dans la rue, écoutez nos concitoyens. Je suis à Montbéliard, toutes les semaines sans exception, du jeudi au dimanche, qu'il pleuve ou qu'il vente, avec ou sans Congrès. Et je bosse beaucoup, sur l'économie, sur les cliniques et l'hôpital, sur le budget de l'agglomération – plombé par un héritage financier dramatique, que je découvre progressivement et dont je dévoilerai bientôt la vérité – sur son projet, sur tous les dossiers.... Tout le monde le sait, sauf les blogueurs fous de l'UMP, qui ne cessent de dénigrer et tournent en rond. Ce n'est pas avec cette démarche, aussi stupide que malveillante, que la droite va retrouver une crédibilité dans le Pays de Montbéliard. Je pourrais m'en réjouir, pour mon confort. Mais parce qu'il n'est pas sain de vivre sans opposition, je le regrette.
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